Mamelouks | Denoix, Sylvie

Mamelouks 834 continuer. Mais ce tableau d’une société qui fonctionne ne doit pas cacher les graves difficultés. Une société qui ne peut éviter le déclin Le système de succession des Mamelouks, où les maisons rivales luttent les unes contre les autres pour qu’un des grands émirs prenne le pouvoir, les amène à s’en- tredéchirer à mort. Entre 1341 et 1382, pas moins de 74 conflits majeurs, rivalités entre les maisons mameloukes pour arriver au pouvoir suprême, ont été réper- toriés (Van Steenbergen, 2006). Le sultan al-Zâhir Barqûq (règne : 1383‑1399) doit lui aussi mater les révoltes des émirs, dont la plus célèbre, car relatée par Ibn Khaldûn, fut celle de l’émir Ibughâ al-Nâsirî (Loiseau, 2010), qui se termina par l’exécution d’un grand du système, l’émir Mintâsh, en 1393. Lors de la succes- sion de ce sultan, son fils, le jeune sultan al-Farag (1399‑1412), doit soumettre par les armes les émirs révoltés s’il veut se maintenir sur le trône. En outre, des périodes de mauvaises récoltes, de cherté, de disettes et d’épi- démies déstabilisèrent ce système. Après la Peste noire qui atteignit l’Égypte pra- tiquement en même temps que l’Occident, la quantité des êtres humains restés vivants est trop faible pour permettre une reprise. La peste est présente de manière endémique tout au long du xiv e siècle, des épidémies meurtrières, en 1348, puis en 1360, sont suivies de chertés en 1374‑1375. De 1403 à 1406, ce fléau ravage le Proche-Orient au point qu’il manque des bras pour ensemencer les champs et récolter : les disettes commencent à frapper les villes où des quartiers entiers tombent en ruines ; dans les mêmes années, les crues sont insuffisantes et cer- taines cultures sont abandonnées. Malgré cette grave crise démographique, l’économie reprend un temps, à la fin du xiv e siècle, grâce au grand commerce international. Mais, au xv e siècle, une série de mauvaises crues entraîne à nouveau disettes, famines, mortalités et une baisse notable de la démographie. La peste sévit encore à la fin du xv e siècle et les auteurs du moment sont frappés par le désastre au point qu’un genre lit- téraire, les Khitat , se met en place et décrit la topographie de la ville telle qu’elle a été dans sa splendeur par des auteurs nostalgiques du passé, dont le plus célèbre est Maqrîzî (1364‑1442). Après une reprise sous al-Mu’ayyad (1412‑1421) et surtout al-Ashraf Barsbay (1422‑1438), la découverte par les Portugais de la route des Indes en contour- nant l’Afrique pour accéder directement aux contrées des épices et des soie- ries porta un coup fatal au commerce égyptien. En outre, les guerres contre les Mongols de Tamerlan, puis contre les Ottomans, vidèrent les caisses du Trésor.

RkJQdWJsaXNoZXIy NDM3MTc=