Industrialisation | Chastagnaret, Gérard; Raveux, Olivier

Industrialisation 705 méditerranéen et atlantique. La perte de ce dernier provoque la contraction de l’activité dès les années 1860. Les succès d’Hermoupolis reposent aussi sur une association, celle d’un marché national naissant, d’abord largement insulaire, et d’une ouverture méditerranéenne. L’importance croissante de la Grèce conti- nentale et la montée en puissance du Pirée privent la ville des Cyclades d’une bonne part du marché intérieur et contribuent à la crise industrielle. Insertion durable dans des courants d’échange, combinaison d’échelles et d’ouvertures spatiales ; ces éléments ont sans nul doute servi les dynamiques industrielles dans la longue durée, mais ils ne sauraient rendre compte de l’intégralité du processus industriel : en Méditerranée pas davantage qu’en d’autres lieux, l’usine est une simple annexe de l’entrepôt. Les logiques productives L’opposition entre d’une part le sérieux du comportement industriel, fondé sur l’investissement, et d’autre part la logique commerciale ou la spécula- tion en quête d’aubaines, ne prend pas en compte les difficultés et même les impératifs auxquels se sont trouvées soumises la plupart des industries médi­ terranéennes, confrontées à la concurrence internationale dès que leurs pro- ductions débordaient des cadres étroits des marchés locaux et même nationaux. En Méditerranée, l’industrie est restée longtemps confrontée à un dilemme : modernisation ou surproduction. Un investissement excessif pouvait conduire à l’échec bien plus sûrement que le maintien d’archaïsmes. Par ailleurs, la décision devait prendre en compte la disponibilité et le coût des facteurs de production : l’étroitesse du marché des capitaux, en dépit de la splendeur de quelques fortunes, et en revanche une main-d’œuvre abondante et peu coû- teuse. Néanmoins, aussi particulières et difficiles que soient ces conditions, elles furent loin de déboucher toujours sur des archaïsmes : l’introduction d’inno- vations et le recours à des techniciens étrangers, britanniques le plus souvent, furent en général plus simples et moins coûteux qu’on ne l’a cru. Enfin, plu- sieurs innovations furent développées localement, en réponse à des problèmes ou à des atouts spécifiques : l’un des meilleurs exemples en est le four à manche inventé par un pharmacien de Carthagène pour traiter les carbonates locaux à faible teneur en plomb, rebelles aux techniques « anglaises ». Les clichés de disqualification doivent donc laisser place à une analyse des termes de la déci- sion. Une occasion conjoncturelle ou l’existence d’un petit marché local pou- vaient conduire à jouer sur la main-d’œuvre. Dans d’autres cas, la conquête d’un marché national pouvait déboucher sur une modernisation limitée, non compétitive à l’extérieur. Plusieurs industries, telles que la chimie, la métal- lurgie, la tuilerie présentent de multiples cas d’introduction de techniques de pointe, à commencer par la machine à vapeur, précocement utilisée et

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