Industrialisation | Chastagnaret, Gérard; Raveux, Olivier

Industrialisation 703 dans le cadre de multiples nuances régionales, l’industrie moderne est apparue précocement. Présente dès le premier tiers du xix e siècle dans plusieurs régions, y compris l’Andalousie, à Séville et Malaga, la sidérurgie de base n’est cepen- dant pas omniprésente et éprouve des difficultés à s’inscrire dans la durée, sauf en Italie grâce à l’appui de l’État. L’industrie textile est fortement implantée dans plusieurs régions, de la Catalogne au Milanais, mais nombre de ses implanta- tions locales, de type pré-ou proto-industriel, sont peu à peu condamnées. En revanche, les constructions mécaniques, le traitement des non-ferreux acquièrent une importance considérable, par exemple à Hermoupolis et surtout dans la région marseillaise à partir du deuxième tiers du siècle : ainsi, des années 1840 aux années 1860, Marseille constitue le pivot de l’économie mondiale du plomb. Plus spectaculaire encore est l’essor de la chimie, surtout dans la région mar- seillaise : le démarrage en est favorisé par le blocus continental, mais l’activité se développe et se renouvelle, y compris jusqu’au xx e siècle. L’agroalimentaire, de la filière du blé à celle des corps gras, constitue un maillage serré d’activités, sur l’ensemble du bassin, avec des structures techniques marquées par le main- tien de pratiques traditionnelles et des phases d’innovations à l’origine de fortes concentrations. Partie prenante de la première phase de l’industrialisation, la Méditerranée n’a cessé depuis lors de s’ouvrir à toutes activités nouvelles : l’au- tomobile, avec de multiples initiatives locales, dont la plus célèbre est Hispano-­ Suiza à Barcelone dès le début du xx e , avec une grande firme, Fiat, qui a essaimé dans divers lieux de production depuis sa base de Turin, avec aussi des usines établies dans plusieurs pays, de l’Espagne et du Maroc jusqu’à la Turquie par de grands groupes européens ou américains. Après avoir été l’une des terres d’élec- tion, notamment grâce à Olivetti, de ce qui est devenu bien plus tard la bureau- tique, la Méditerranée joue un rôle important, et dans certains cas pionnier, dans la micro-informatique, en particulier les microprocesseurs. Le nucléaire est aussi très présent, non seulement par des centrales fluviales ou côtières, mais aussi par la recherche de pointe, illustrée par l’hébergement du projet iter sur le site de Cadarache. En fait, toutes les industries de pointe, y compris l’espace, sont pré- sentes, à des titres divers, sur les rives de la Méditerranée. Cette vitalité a donné lieu à l’émergence d’ensembles industriels, à l’échelle urbaine ou régionale, fonc- tionnant souvent, quoique de manière discrète, dans le cadre de synergies de districts. Le Milanais, le Piémont, la Catalogne en sont des exemples emblé- matiques, mais ils sont loin d’être les seuls. Ainsi, dès le xix e siècle, Marseille, avec ses constructions mécaniques, ses fabriques de soude, ses savonneries et huileries, ses minoteries, ses tuileries, sa manufacture de tabac et de multiples autres activités, depuis les chapeaux jusqu’aux cartes à jouer, constitue, dès le xix e siècle, un exemple extrême de la diversité sectorielle et structurelle de l’in- dustrie méditerranéenne. Ce n’est toutefois pas un cas atypique : à partir du

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