Industrialisation | Chastagnaret, Gérard; Raveux, Olivier

Industrialisation 702 historienne, y compris d’ailleurs pour l’Angleterre. Plusieurs travaux remirent alors en question des aspects majeurs du « modèle » britannique d’industriali- sation. Pour les pays méditerranéens, ce fut le début d’une période particulière- ment féconde pour l’histoire économique, marquée notamment par la volonté de prendre en compte l’intégralité du passé industriel, en dehors de toute approche normative, dans le cadre de recherches originales comme de démarches patrimo- niales, à Barcelone mais aussi à Venise. Le rejet de toute normalisation préalable permit d’élargir considérablement le panorama industriel de la Méditerranée, dans deux directions, l’une sectorielle, l’autre structurelle. L’élargissement sec- toriel fut spectaculaire : l’agroalimentaire, le tabac, la chaussure, le travail du bois et bien d’autres activités de transformation entrèrent désormais dans l’ho- rizon des recherches d’histoire industrielle. L’équipe catalane réunie autour de Jordi Nadal joua en ce domaine un rôle décisif, qui culmina en 1994 avec la publication d’un ouvrage consacré précisément aux secteurs « non leaders », en claire allusion au dogmatisme passé. L’élargissement structurel ne fut pas moins important : la dimension des entreprises et le degré d’innovation technique ces- sèrent de jouer un rôle déterminant. Les petits fours à plomb de Carthagène ou d’Hermoupolis, les grandes fabriques de tabac méritent désormais la même attention que la grande industrie textile ou métallurgique. La Méditerranée s’est trouvée enfin, de ce fait, légitimement intégrée dans le long terme de l’industria- lisation européenne (Dewerpe, 1985). Une observation qui concerne tout par- ticulièrement Marseille, dont l’histoire industrielle est infiniment plus longue, en amont comme en aval, et plus riche que l’« âge d’or » de quelques décennies longtemps mis en avant. Une industrialisation différente ? Il est encore un peu tôt pour apprécier pleinement toute la portée d’un chan- gement, qui fut, par certains aspects, une véritable révolution de perspective. Il n’a pas encore donné tous ses fruits, en particulier pour la France méridionale, même si des travaux récents ont constitué, ces dernières années, des avancées décisives. De manière générale, des résultats majeurs peuvent déjà être enregis- trés, dans deux domaines : la nature des activités industrielles et les logiques qui les sous-tendent. Un large éventail d’activités Une chose est sûre : la Méditerranée n’a pas été ce désert industriel, ce paradis des échecs, ce refuge des archaïsmes longtemps opposé aux réussites du « berceau » de la révolution industrielle. En dépit du poids de l’agriculture traditionnelle et

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