Genre | Rebucini, Gianfranco

Genre 587 des relations entre femmes. La position relative que chacun des acteurs sociaux peut prendre, à un moment particulier de son existence ou en relation à un autre acteur particulier, pourrait en effet conduire à une relation de pouvoir qui ne se résumerait pas à la seule dichotomie homme/femme, entendue forcément comme une relation de dominant/dominée. La relation de pouvoir étant plus complexe que cela, l’actualisation dans les rapports réels de pouvoir doit être comprise dans sa spécificité matérielle et relationnelle dans les actes et les repré- sentations particuliers. Cependant, cet ouvrage, à lui seul, même s’il remet en cause certains stéréotypes de l’anthropologie concernant les sociétés dites arabo-­ musulmanes, et plus largement méditerranéennes, ne peut arriver qu’à érafler ces catégories tant elles sont ancrées dans les discours des sciences sociales sur la rive sud de la Méditerranée. Si les travaux qui assument une analyse par le genre des rapports hommes/femmes sont donc plus rares dans cette aire culturelle, par contraste une certaine tradition de sociologie des femmes demeure redevable d’une vision plutôt statique de la différenciation des sexes, et le plus souvent dépendante d’un déterminisme culturel ou plus encore religieux. Ainsi, représentative de cette tra- dition, Fatima Mernissi, sociologue et militante des droits des femmes au Maroc, s’est pleinement intéressée à la condition de la femme et aux causes de la résistance à l’acquisition de pleins droits de la part des femmes. Les aspects religieux demeu- rant très présents dans ses études ; cette auteure les utilise pour éclaircir les pos- sibles racines idéologiques et historiques de l’oppression des femmes (Mernissi, 1986). Dans ce cadre, la condition de la femme et de l’homme, la masculinité et la féminité, sont pourtant vues comme des évidences. Dans les ouvrages de Fatima Mernissi, en effet, les représentations du féminin ne sont analysées qu’en termes secondaires par rapport aux explications de nature religieuse ou civilisa- tionnelle. Les rapports sociaux des sexes ne sont guère pris en compte. Pourtant, une tradition d’études plus récente sur le monde islamique s’est inté- ressée aux pratiques et aux relations quotidiennes des individus à la religion dans une perspective plus spécifiquement genrée. Dans une étude importante sur les femmes engagées dans le mouvement des mosquées en Égypte, l’anthropologue Saba Mahmood (2009) a montré que leur désir d’aller chercher en dehors de soi (dans la pratique religieuse, dans les textes et dans la loi islamiques) les idéaux et les outils de transformation de soi remet en question la séparation commu- nément admise entre individu et société. Contrairement à une vision libérale qui voudrait la soumission aux normes religieuses comme foncièrement oppres- sante, la religiosité féminine, selon Mahmood, peut s’avérer l’instrument d’une certaine volonté émancipatrice des normes et des valeurs imposées par la société égyptienne. Les études traitant du féminisme islamique (entre autres, Ali, 2012) analysent comment celui-ci contribue à une lecture critique des textes et de la

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