Fromage | Angioni, Giulio

Fromage 563 nombreuses fromageries sociales et coopératives, dont la plupart ont cependant fait faillite. L’élevage ovin, de plus en plus parqué dans des bergeries modernes où les bêtes se nourrissent de fourrage industriel, où la traite est mécanisée et le lait transporté dans des pick-up japonais, profite de moins en moins de la crise de l’agriculture traditionnelle qui avait pourtant permis aux nouveaux bergers d’ac- céder à des terres et à des exploitations. Les bergers sardes se sont mis à racheter des terres de pâturage sur l’île et sur le continent, se lançant ainsi dans une vaste et ultime transhumance sarde par-delà la mer Tyrrhénienne, mais dépendant toujours en amont des fournisseurs en fourrage et outillage varié, et en aval des industriels du fromage. À différents degrés, les bergers ont toujours été en pos- session des conditions de leur propre production, dépendant des autres pour les pâturages et le fourrage, le bétail, les infrastructures, la main-d’œuvre ; faisant appel à différentes figures plus ou moins modernes de donneurs d’ouvrage et à des servi pastori (« ouvriers bergers ») plus ou moins traditionnels. Aujourd’hui, les nouveaux ouvriers bergers sont des immigrés de l’Europe de l’Est ou des Maghrébins. Citons pour finir une bizarrerie, presque une farce, qui dure elle aussi depuis plus d’un siècle et que jugeront bon de connaître les amateurs de circuits courts et du commerce équitable : tandis que la majeure partie du lait de brebis produit sur l’île est transformé en pecorino romano , ce fromage ne se trouve dans aucun commerce de Sardaigne ; les Sardes n’y ont jamais goûté et n’en connaissent ni le nom ni la couleur. Aujourd’hui, la consommation de fromage est en augmentation constante dans le monde entier et tout particulièrement en Méditerranée où semble se repro- duire et s’amplifier la situation agropastorale ancestrale. Avec plus de 30 kg de fromage par an et par habitant (dont les trois quarts sont de la feta , le fromage le plus apprécié des Grecs), la Grèce est en tête du classement mondial de consom- mation moyenne de fromage. En deuxième position vient la France, avec une consommation moyenne annuelle de 24 kg par habitant. Les plus consommés sont l’emmental – utilisé surtout comme ingrédient culinaire, et le camembert, deux fromages qui, du reste, ne sont pas typiquement méditerranéens, suivis ensuite par le roquefort, l’un des fromages de la grande triade méditerranéenne, voire mondiale, des fromages de brebis à laquelle appartiennent également la feta grecque et le pecorino italien (le pecorino romain, sarde, sicilien, etc.). En troisième position vient l’Italie, avec une consommation moyenne de 23 kg par an et par habitant. Puis Malte, les pays de l’Europe centrale, du Nord et de l’Est, ainsi que les zones du monde les plus européanisées qui ont adopté, entre autres choses, les nombreuses appellations de fromage dérivant du latin caseus et formaticus .

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