Forêt | Chalvet, Martine

Forêt 551 Forêt Dans son acception la plus large, la forêt méditerranéenne regroupe des forêts dispersées sur le pourtour méditerranéen mais aussi en Californie, dans cer- taines régions du Chili, d’Afrique du Sud et d’Australie. Toutefois, une forêt circumméditerranéenne, propre au pourtour méditerranéen, a été définie par les botanistes, les forestiers et les géographes entre la fin du xix e et la première moitié du xx e siècle. Dotées de limites souvent imprécises et fluctuantes, et pré- sentant des visages très divers, les forêts en Méditerranée se caractérisent toute­ fois par des écosystèmes spécifiques. Cependant, l’écosystème de la forêt est une notion complexe, liée à l’action du climat, des sols, des évolutions végétales et animales, des incendies mais aussi à l’action des hommes. Actuellement, la forêt méditerranéenne est présentée comme une évidence naturelle qui se passe d’histoire, un milieu spécifique, fragile, dégradé par l’homme et victime d’in- cendies récurrents. Pourtant, la forêt méditerranéenne n’est pas seulement un objet naturel mais aussi un objet social et un objet d’histoire. Dans ce cadre, quelle a été la part des sociétés dans la formation de ces écosystèmes ? Quand, comment et pourquoi les hommes ont-ils édifié un paysage et une science syl- vicole spécifiquement méditerranéens ? Ces questionnements interrogent la genèse puis l’enracinement d’un concept scientifique, l’émergence d’un sys- tème de représentations et de pratiques forestières inédites qui ont forgé la forêt méditerranéenne comme une entité « naturelle ». Dans sa thèse fondatrice La Méditerranée et le Monde méditerranéen à l’époque de Philippe II , Fernand Braudel avait déjà montré l’existence d’une région médi- terranéenne « naturelle » et d’une unité géo-humaine spécifique. Faisant œuvre d’historien et de géographe, le pionnier de la nouvelle histoire avait décrit sur le temps long les liens qui unissaient l’homme et son environnement. Il avait montré que pour pallier les effets néfastes des sécheresses ou à l’inverse des pluies violentes, et pour améliorer des sols souvent infertiles, les sociétés avaient trouvé des techniques et des plantes adaptées et les avaient transmises, depuis le Néolithique, de part et d’autre de la Méditerranée.

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