Fascisme | Mourlane, Stéphane

Fascisme 532 à leurs fins en établissant un régime dictatorial. Dans certains cas, l’apparente- ment est idéologique, quoique superficiel ; dans d’autres, les emprunts ne sont que formels (culte du chef, goût des uniformes et des parades, organisations paramilitaires). Dans une perspective d’universalité de Rome, Mussolini tente de prendre la tête d’une « internationale fasciste » au travers de l’organisation de rencontres et en apportant un appui financier à divers groupes d’extrême droite influencés par le « champ magnétique » du fascisme (Burrin, 2004). Parmi les ligues françaises actives au début des années 1930, la Francisque de Marcel Bucart reçoit notamment des subsides de Rome tout comme, en Espagne, les phalanges de José Antonio Primo de Rivera. Le père de ce dernier, Miguel Primo de Rivera, qui établit une dictature à Madrid en 1923, ne cache pas ses sympathies pour le Duce italien, tout comme plus tard, en 1936, Metaxas à la tête d’une dicta- ture militaire en Grèce. À Athènes, toutefois, on ne peut parler véritablement de régime fasciste : l’État corporatiste est rapidement abandonné et l’analogie demeure seulement dans l’encadrement de la jeunesse dans des organisations étatiques et paramilitaires. Le Parti national socialiste grec de George Mercouris, qui se revendique fasciste, ne tient qu’un rôle supplétif marginal. La question de la nature fasciste des dictatures de la péninsule Ibérique a longtemps été posée. Leurs opposants se sont engagés au nom de l’antifascisme. Il existe à l’évidence des forces appartenant à l’orbite fasciste qui ont soutenu Franco en Espagne et Salazar au Portugal. En Espagne, la Phalange, fondée en 1931, rassemble des éléments extrémistes venus d’horizons divers et porteurs d’un idéal révolution- naire, comme les faisceaux italiens. Les phalangistes, sur lesquels Franco peut s’appuyer, portent l’uniforme (la chemise est bleue) et défilent le bras levé en scandant des slogans nationalistes. À cette homothétie s’ajoute une sympathie franchement affirmée à l’égard de Mussolini. Au Portugal, les admirateurs du Duce se trouvent dans l’entourage de Salazar, à l’instar d’Antonio Ferro qui dirige le secrétariat à la Propagande nationale. Mais, comme en Espagne avec la Phalange, les fascistes déclarés sont bien encadrés au sein de la Legiào portu- guesa fondée en 1936. On n’assiste donc pas à une fascisation de l’État. Franco et Salazar sont à la tête de dictatures fondamentalement conservatrices qui les distinguent du régime mussolinien aux présupposés révolutionnaires et moder- nistes. Le rôle de l’Église espagnole et portugaise dans l’encadrement de la société constitue un point essentiel de distinction. L’autoritarisme, la propagande, les formes d’organisation sociales et politiques (le parti unique notamment), avec certes des nuances selon les pays, puisent à l’évidence leur inspiration dans le modèle fasciste, sans en adopter le caractère pleinement totalitaire. Au demeu- rant, après la Seconde Guerre mondiale, les mimétismes même formels avec le fascisme tendent à se diluer dans des régimes qui survivent jusqu’aux années 1970.

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