Écosystèmes | Médail, Frédéric

Écosystèmes 447 car ils contribuent à modeler la diversité des paysages, les hétérogénéités et les dynamiques des écosystèmes et facilitent la régénération des végétaux adaptés au feu. Celui-ci constitue donc une force sélective majeure qui a façonné, au fil de l’évolution, les caractéristiques biologiques des espèces structurant les éco- systèmes méditerranéens, notamment les arbres et arbustes, qui possèdent, en général, une bonne résilience écologique. L’influence ancienne de l’homme sur la nature méditerranéenne L’impact humain, très important et précoce en Méditerranée, remonte à plu- sieurs dizaines de millénaires et s’est exacerbé avec la conquête du feu. Au début de l’holocène, vers 10 000 ans avant le présent ( bp ), les défrichements et déboi- sements sont encore relativement ponctuels et temporaires ; ils reposent sur la pratique des landnams , ouvertures transitoires et de petites superficies du milieu boisé pour l’élevage ou l’agriculture, un mode d’usages des terres qui prédomi- nera jusque vers 5 000 ans bp . La phase d’amélioration climatique de l’Atlantique correspond, surtout à partir de sa seconde moitié, au développement de civi- lisations humaines qui ont profondément perturbé l’environnement médi­ terranéen. Ainsi, vers 4 700‑4 500 ans bp , l’emprise anthropique sur les forêts méditerranéennes augmente, particulièrement en basse altitude mais aussi dans certains massifs montagneux (Taurus occidental, Sud-Est de la Grèce, Corse, Alpes méridionales, Rif). À l’âge du bronze et durant toute l’Antiquité, un palier supplémentaire est franchi avec la généralisation des déboisements qui débutent à différentes époques selon les régions : vers 3 200 ans bp au nord-ouest de la Grèce, ou vers 2 800 ans bp en Corse. Le triptyque agriculture-feux-pâturage a donc eu une influence prépon- dérante dans l’évolution de la structure et de la biodiversité des écosystèmes terrestres de Méditerranée. À l’orée des périodes historiques, l’homme a proba- blement détruit une portion notable des forêts qui couvraient cette région, et l’on estime à seulement 5 % la surface actuelle couverte par la végétation natu- relle non directement impactée par l’homme. Ce défrichement des forêts a été justifié par la recherche de terres de culture et de pacage. Ainsi, en moins de 10 siècles, du v e siècle av. J.‑C. aux invasions barbares, plus de la moitié des forêts méditerranéennes a sans doute été dévastée. Cette théorie du « paysage en ruines ou de l’Éden perdu » est parfois contestée par les pourfendeurs d’une vision moins pessimiste de l’impact humain (Grove et Rackham, 2001). Ils sou- tiennent que les paysages de « savanes arborées » seraient bien caractéristiques

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