Écosystèmes | Médail, Frédéric

Écosystèmes 446 non-équilibre des stades de succession et les processus liés au hasard (c’est-à‑dire les stochasticités liées à l’environnement ou à la démographie des espèces) parti- cipent pleinement à la dynamique des écosystèmes. Les processus n’étant pas uni- directionnels, l’« équilibre » d’un système écologique doit être considéré comme un état dynamique permanent qui oscille selon plusieurs tendances fonction- nelles comprises dans un cadre spatio-temporel suffisamment vaste. Ce constat explique toute la difficulté que représente le maintien artificiel d’un écosystème dans un « état de conservation favorable », comme le stipule pourtant la direc- tive européenne Habitat-Faune-Flore de 1992 aux gestionnaires des sites du réseau Natura 2000 ! Deux ensembles de facteurs gouvernent les dynamiques des écosystèmes médi- terranéens : les stress écologiques et les perturbations. Le stress est un facteur externe, le plus souvent cyclique, et lié à l’environnement physico-chimique, notamment le climat ; il a pour effet de ralentir la productivité des écosystèmes. La sécheresse estivale ou les contraintes liées au froid, sur les marges septentrionales du monde méditerranéen, constituent ainsi de puissants facteurs structurants. La perturbation se définit comme tout événement relativement discret et impré- visible dans le temps qui désorganise la structure de l’écosystème en conduisant à une destruction partielle ou totale de sa biomasse. Moteurs des successions écologiques et de l’hétérogénéité des écosystèmes, les perturbations déterminent des mosaïques d’habitats à divers stades dynamiques et favorisent la coexistence de différents cortèges d’espèces (guildes), garante d’une biodiversité locale élevée. La dynamique forestière, par exemple, repose sur trois grands types de per- turbations « naturelles » ou spontanées, qui opèrent à différentes échelles spatio-­ temporelles : – les perturbations localisées, comme les chablis créés par la chute des vieux arbres, sont responsables des micro-hétérogénéités au sein des peuplements forestiers ; – les perturbations induites par la faune, notamment les grands vertébrés herbivores, ont joué un rôle déterminant dans la coexistence de communautés à divers stades dynamiques ; – les grandes perturbations abiotiques (incendies, tempêtes), qui se déroulent ordinairement sur des pas de temps assez longs et aboutissent à des transforma- tions plus nettes dans le paysage. Pour chaque grand type d’écosystème, il est alors théoriquement possible de définir un régime régional de perturbations spontanées et d’estimer de quelles façons les impacts humains l’ont altéré. Tel est le cas des feux de forêt dont la fréquence accrue en Méditerranée est d’origine surtout anthropique. Souvent considérés comme des « catastrophes écologiques », les incendies, s’ils ne sont pas trop fréquents, ont en fait une importance écologique et évolutive indéniable,

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