Écosystèmes | Médail, Frédéric

Écosystèmes 445 L’existence d’un gradient croissant d’oligotrophie ouest-est explique le fonc- tionnement écologique distinct des deux bassins (The MerMex Group, 2011). Les bilans biogéochimiques de surface dépendent en premier lieu des apports d’eau douce venant des fleuves qui augmentent localement la productivité pri- maire. Ces apports continentaux montrent une forte variabilité spatio-temporelle et sont dominés par des événements atmosphériques extrêmes liés notamment aux dépôts de poussières sahariennes ou, plus ponctuellement, aux incendies de forêt et aux pollutions par les aérosols anthropogéniques. Si le bassin médi- terranéen se caractérise par un bilan radiatif élevé, ces apports atmosphériques altèrent les réactions photochimiques et la structure des communautés plancto- niques qui sont à la base des réseaux trophiques marins. Loin d’être un système stationnaire, les suivis à long terme ont montré les changements significatifs subis par la Méditerranée depuis plusieurs décennies, y compris au niveau des eaux profondes (The MerMex Group, 2011). Dynamique des écosystèmes Les théories sur la dynamique des écosystèmes ont beaucoup évolué depuis un siècle, et se sont vite scindées en deux approches dichotomiques. Partisan d’une étude globale de l’écosystème, Clements a défendu une conception holiste selon laquelle la succession aboutit au « climax », considéré comme l’état d’équilibre unique déterminé par les conditions environnementales régionales. Cette théorie du monoclimax de la végétation a été ardemment soutenue par Braun-Blanquet et la majorité des phytosociologues européens, conduisant à des schémas dyna- miques simplistes. Un exemple marquant est celui de la forêt de chêne vert ou yeuse, longtemps considérée comme la végétation potentielle, climacique, de Provence et du Languedoc. Or, les études paléoécologiques et la dynamique éco- logique actuelle causée par la baisse des usages agro-sylvo-pastoraux montrent bien la place clé des essences caducifoliées (chêne pubescent, érables, sorbiers...) dans ces forêts en voie de maturation. Gleason propose, quant à lui, une conception réductionniste de l’écosystème, en soutenant que les processus doivent être étudiés au niveau des espèces et des populations. Les trajectoires écosystémiques seraient dans ce cas beaucoup plus aléatoires puisque la dynamique des individus et des espèces reposerait sur des facteurs largement imprévisibles dans l’espace et dans le temps. Les résultats de ces deux dernières décennies de recherches vont dans le sens de cette conception. La notion de climax est totalement remise en cause, car cette conception trop déterministe ne rend pas compte des hétérogénéités et des multiples trajectoires possibles des paysages et écosystèmes méditerranéens. En effet, les conditions de

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