Échelles du Levant | Buti, Gilbert; Raveux, Olivier

Échelles du Levant 436 désordres qui peuvent être exploités par les autorités locales pour exiger quelque imposition exceptionnelle, a également le droit d’expulser le contrevenant. Il n’est pas autorisé à un homme marié d’être accompagné de son épouse et à un céliba- taire de se marier au Levant, une interdiction néanmoins maintes fois contournée. Par ailleurs, les marchands établis dans les échelles doivent être vêtus à la mode orientale, à la longue , avec robe et caftan mais portent perruque et chapeau ; seul le consul a un habit européen. Toutefois, à partir de 1776, celui-ci est astreint au port d’un habit à la française, bleu de roi et galonné d’or. Au vrai, cette mesure s’inscrit dans un ensemble de décisions qui visent à reprendre en main les nations des échelles en luttant contre un certain nombre d’abus, notamment dans les comptes, qui se manifestent dans la première moitié du xviii e siècle. Une forma- tion consulaire est mise alors en place tandis qu’est instituée une hiérarchie entre les postes : consulats généraux, consulats et vice-consulats. La carrière de consul se régularise avec la nécessité d’un long apprentissage comme chancelier ou vice- consul pour pouvoir accéder à un consulat secondaire et parvenir ensuite, en fin de carrière, à la direction des grandes échelles. La carrière de Jean-Vincent Arazy est un modèle d’avancement bien réglé : chancelier à Candie(1748), à Salonique (1750), à Seyde (1756), à Smyrne (1763), puis consul à Salonique (1774‑1779) et enfin consul général à Seyde (1779‑1785). En outre, trois arrêts du Conseil du roi accompagnent, en 1776, cette volonté de remise en ordre : l’un exige l’extinction des dettes des échelles, l’autre interdit tout emprunt fait par la nation , et le dernier fixe une imposition unique pour le commerce du Levant. Qui plus est, afin de disposer d’un état des lieux, le secré- taire d’État, Sartine, confie une mission d’inspection générale dans les échelles au baron de Tott. L’ordonnance de mars 1781 qui en résulte reprend en fait les dispositions antérieures, peu ou plus appliquées, et supprime la taxe de 20 % ad valorem qui frappait, depuis 1669, les marchandises levantines introduites à Marseille par les navires étrangers. Devant la vive protestation des négociants marseillais qui désirent que l’on regarde « les établissements en Levant comme des colonies formées en ces divers États de l’Empire ottoman » et qui affirment avec stupeur que « les Orientaux vont devenir nos maîtres », la liberté du commerce au Levant est suspendue en avril 1785. Au-delà de la petite colonie marchande, la responsabilité du consul s’étend également sur tout un ensemble de personnes qui participent à la vie de la nation et que les textes désignent sous le nom de « protégés » ; ils bénéficient des avan- tages procurés par la protection consulaire (liberté de culte, exemption ou réduc- tion d’impôts et taxes douanières, juridiction spécifique, sécurité commerciale) et sont soumis aux charges qui en découlent (paiement des droits de consulat et d’avanies). Ces protégés, en nombre variable selon les lieux et les moments, rassemblent des éléments très hétérogènes par leurs origines et leur rôle dans la

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