Échelles du Levant | Buti, Gilbert; Raveux, Olivier

Échelles du Levant 432 Échelles du Levant Le terme « échelle » est attribué, à partir de la seconde moitié du xvi e siècle, aux places maritimes de l’Empire ottoman fréquentées par les navires de commerce des puissances chrétiennes où résident en permanence des marchands européens qui bénéficient de certains privilèges. Le mot dérive sans doute de l’italien scala , par l’intermédiaire de la lingua franca utilisée par les gens de mer jusqu’au milieu du xix e siècle ; il se retrouve également dans le turc iskele et désigne à l’origine un débarcadère ou appontement utilisé dans les ports pour embarquer et débarquer les marchandises, c’est-à-dire l’endroit où les navires marchands font descendre leur « échelle de bord » pour commercer lors des « escales ». Ainsi en est-il en Barbarie d’Alger, Tunis et Tripoli, en Égypte d’Alexandrie et, surtout, au Levant de Constantinople, Salonique, Smyrne, Chios, La Canée, Candie, Larnaca, Seyde, Tripoli de Syrie, Beyrouth, Acre et de la poussière des petites échelles de Morée (Navarin, Patras, Naples de Romanie…) et des îles de l’Archipel (comme Tinos, Paros, Naxos…). Par extension, on utilise le terme d’échelle pour les places commerciales non maritimes où vit une communauté marchande européenne se livrant au commerce d’importation et d’exportation, comme Alep ou Le Caire, étroitement reliées au littoral par un ou deux ports : Alexandrette pour la première, Alexandrie et Rosette pour la seconde. Les places principales rayonnent sur un ensemble d’échelles secondaires et servent de point d’appui à des entreprises régionales : Constantinople sur les détroits, Salonique sur la côte de Macédoine, Smyrne en Asie Mineure, Candie en Crète, Larnaca à Chypre, Alep en Syrie du Nord, Seyde sur la côte syro-palestinienne et Le Caire en Égypte. Les échelles forment un réseau commercial aux mailles plus ou moins serrées et rassemblent des effectifs très inégaux (tableau p. 433). À la fin du xviii e siècle, celle de Smyrne, qui est alors la plus florissante, compte une centaine de personnes tandis que celle de Larta, en Morée, n’en a que deux ; les effectifs sont souvent au-dessous de 40 personnes. Un état des Français rési- dant dans l’ensemble des échelles donne, pour 1764, la présence de 638 mar- chands ; en y ajoutant les petits établissements qui ne figurent pas sur cet état, et

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