Diaspora | Anteby-Yemini, Lisa

Diaspora 379 méditerranéen avec leurs traditions de « diasporas marchandes » comme « peuples de négoce » (Braudel, 1949) et leur installation le long des routes maritimes et des voies commerciales a permis la création de comptoirs et de réseaux de cir- culation économique, culturelle, financière, intellectuelle et religieuse. Par leurs professions (marchands, artisans, intellectuels), ces diasporas, souvent qualifiées de « minorités d’intermédiaires », ont contribué au cosmopolitisme de villes méditerranéennes. Elles ont ainsi développé une « culture diasporique », faite de savoir-circuler et de capital social et linguistique (leurs membres étaient sou- vent polyglottes), qui leur a permis de s’intégrer rapidement. Enfin, la mise en place de lieux de culte, d’écoles, d’associations, de territoires ethniques, le main- tien de la langue d’origine, l’endogamie et la célébration de fêtes religieuses et culturelles ont préservé et transmis à travers les siècles une identité propre au groupe, ravivée par les liens et les retours vers la terre d’origine. Les « nouvelles » diasporas Au xix e siècle, de « nouvelles » diasporas apparaissent, dont un grand nombre est d’origine méditerranéenne. Les Libanais, par exemple, parfois qualifiés de « diasporas marchandes » en raison de leurs vastes réseaux commerciaux en Méditerranée et au-delà, commencent au début du xx e siècle à émigrer de leur territoire d’origine en raison d’instabilités politiques. Mais ce sont sans doute les Palestiniens qui représentent l’une des diasporas modernes les plus étudiées. Avec la création en 1948 de l’État d’Israël, 700 000 Palestiniens sont forcés de s’exiler de leur terre d’origine (plusieurs centaines sont tués par les Israéliens) et se réfugient dans les pays alentour (Égypte, Jordanie, Syrie, Liban), les États du Golfe, ou migrent vers l’Occident. Depuis, la mémoire de la Naqba (catas- trophe) renforce l’identité palestinienne diasporique et alimente les revendica- tions au droit du retour et à un État national palestinien. Si la mobilisation de la diaspora se fait avant tout autour d’un projet politique, d’autres dimensions (économique, culturelle, linguistique, humanitaire) jouent un rôle important. Les Kurdes constituent également une nouvelle diaspora « politique » ; depuis les persécutions qu’ils rencontrent en Irak, en Iran et en Turquie, ils sont nom- breux à s’exiler dans les pays proches ou en Europe. Depuis les années 1960, les Maghrébins et les Turcs forment, quant à eux, des diasporas « de tra- vail » en Europe ; ils entretiennent des liens étroits avec leur pays d’origine où des migrations circulaires et des formes de citoyenneté multiples permettent une mobilité grandissante dans un espace transnational. Des migrations plus anciennes dans l’Empire ottoman attestent aussi la présence, dans différents pays des Balkans, de minorités turques qui ont parfois connu des expulsions

RkJQdWJsaXNoZXIy NDM3MTc=