Décolonisation | Rappas, Alexis

Décolonisation 341 au projet sioniste d’établir un « foyer national juif » (déclaration Balfour de 1917). Indignés par la décision du gouvernement travailliste de maintenir les restric- tions à l’immigration juive prévues par le Livre blanc de 1939 en dépit de la révé- lation du génocide perpétré par les nazis, les organisations clandestines armées (Haganah, Irgoun et Lehi) engagent une vague d’attentats contre les autorités britanniques dont le plus spectaculaire est celui de l’hôtel King David (1946). La partition de la Palestine en deux États, projetée par les Nations unies – aux- quelles fait appel le gouvernement travailliste – en 1947, suscite des réactions parmi les Palestiniens arabes qui, à leur tour, provoquent l’intervention armée des puissances arabes voisines (Transjordanie, Égypte, Irak, Liban et Syrie). Cette dernière se solde par une victoire en juillet 1949 de l’État israélien, qui avait proclamé son indépendance en mai 1948, l’occupation de la Cisjordanie par la Transjordanie, de la bande de Gaza par l’Égypte, un exode massif de Palestiniens arabes (al-Naqba, la catastrophe) et un conflit israélo-palestinien aux ramifica- tions régionales et internationales toujours d’actualité. Les cas de Chypre et de l’Égypte illustrent les anxiétés métropolitaines concer- nant leur puissance internationale déclinante dans l’ordre géopolitique de la guerre froide dominé par les superpuissances américaine et soviétique. À Chypre, les autorités britanniques créent des forces auxiliaires issues de la minorité chypriote turque pour contrer la guérilla menée par l’organisation chypriote grecque clan- destine eoka (Organisation nationale des combattants chypriotes), au nom de l’union avec la Grèce entre 1955 et 1959. En 1960, c’est une République chy- priote hypothéquée par de très fortes tensions intercommunautaires qui accède à une indépendance toute relative puisqu’elle est placée sous la « protection » de la Turquie, de la Grèce et de la Grande-Bretagne, cette dernière conservant deux bases militaires souveraines (3 % du territoire) sur l’île. Cette détermination de conserver l’intégralité ou une partie de Chypre est symptomatique des inquié- tudes officielles face au reflux – indépendance de l’Inde et fin de la Palestine mandataire en 1947 – de la puissance internationale britannique en Asie et au Moyen-Orient, région considérée comme d’importance vitale en raison de ses ressources énergétiques. L’importance de Chypre est bien entendu exacerbée lorsqu’en 1956 la Grande-Bretagne, la France et Israël sont contraints par les États-Unis et l’ urss de mettre un terme à leur opération militaire conjointe en Égypte, censée forcer le président Gamal Abdel Nasser de revenir sur sa décision de nationaliser la Compagnie du canal de Suez. Peut-être le seul État méditerranéen dont l’indépendance formelle intervient de manière relativement pacifique fut également le dernier à l’obtenir, à savoir l’île de Malte en 1964. Les nations nouvellement décolonisées – qui entérinent momentanément les frontières territoriales tracées par les colonisateurs – peinent à affirmer leur indé- pendance dans un ordre géopolitique international bipolaire opposant le bloc

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