Cinéma | Gaertner, Julien

Cinéma 246 films traitant souvent de la place des femmes dans les sociétés maghrébines, sujet devenu exclusif chez Férid Boughédir en Tunisie ( Un été à la Goulette , 1996) ou Nadir Moknèche en Algérie ( Délice Paloma , 2009). Un thème qui s’étend depuis peu à la rive orientale chez Mohamed Diab ( Les Femmes du bus 678 , 2012) et Yousry Nasrallah ( Femmes du Caire , 2010) en Égypte, ainsi qu’au Liban avec Nadia Labaki ( Caramel , 2006 ; Et maintenant, on va où ? , 2011). Dans le pays du Cèdre, une même situation de dépendance s’observe, tout comme en Syrie et en Palestine, dans lesquels la faible production annuelle se concentre sur les conflits régionaux ( West Beyrouth , Doueiri, 1998) et la situation de colonisation dans les Territoires palestiniens occupés ( Le Temps qu’il reste , Suleiman, 2009). La carrière du Libanais Maroun Bagdadi ( Hors la vie , 1991), tout comme celle des Palestiniens Elia Suleiman ( Intervention divine , 2002), Rashid Masharawi ( L’Anniversaire de Leïla , 2009) et Hany Abu-Assad ( Paradise Now , 2005), s’ins- crit dans ce même schéma de soutien étranger. Ainsi, exception faite du cinéma égyptien à l’inébranlable suprématie, seul le cinéma turc réussit à conserver son indépendance dans les parties orientales et méridionales du bassin méditerranéen. Fort d’une population urbaine nombreuse, il est en effet en mesure de se lancer dans des projets ambitieux inspirés par les films hollywoodiens à grand spectacle ( La Vallée des loups , Akar, 2006 ; Cinq minarets à New York , Kirmizigül, 2012). Pourtant, si l’influence de l’Europe et des anciennes puissances de tutelle s’ob- serve dans le cinéma de la rive sud de la Méditerranée, en France, un mouve- ment inverse est en marche depuis quatre décennies avec l’influence croissante des immigrés maghrébins et de leurs descendants au sein du paysage cinéma­ tographique. Ils en sont peu à peu devenus les étoiles montantes, gravissant les marches vers le succès. Les premiers films d’Ali Ghanem connaissent des sorties confidentielles ( Mektoub , 1970 ; L’Autre France , 1977) dans les années 1970, mais la situation a nettement évolué depuis le début des années 2000 avec des acteurs populaires tels Jamel Debbouze ou Leïla Bekthi, aussi bien qu’avec des cinéastes majeurs comme Abdellatif Kechiche et Rachid Bouchareb. Avec Hors-la-loi (2010), ce dernier évoque les massacres de Sétif et Guelma perpétrés par l’armée française en Algérie en 1945, sujet qui déclenche polémiques et protestations officielles lors de la présentation du film au Festival de Cannes, révélant ainsi de vives ten- sions mémorielles. Mais ce sont les questions de l’identité et d’un entre-deux socioculturel pour les enfants de l’immigration maghrébine qui se posent dans ces œuvres, davantage que les tabous de l’histoire portés à l’écran. Avec Bye-­ Bye (1995) et Khamsa (2008), tournés à Marseille – ville du cinéaste Robert Guédiguian et des succès publics de la saga Taxi –, Karim Dridi explore ces tourments autant qu’il renverse les stéréotypes. Une voie dans laquelle Abdellatif Kechiche entraîne spectateurs et critiques, de La Faute à Voltaire (2000) à La Graine et le Mulet (2007).

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