Chrétiens | Kaoues, Fatiha

Chrétiens 236 Les concordats conclus par le pape avec les États, notamment celui signé en 1801 avec Bonaparte, laissent augurer de nouvelles reconquêtes. « Omnia ins- taurare in Christo » (« Tout restaurer dans le Christ ») devient le leitmotiv des autorités pontificales. L’ultramontanisme triomphe du gallicanisme. La fidé- lité à cet « autre côté des monts  » , c’est-à-dire au Saint-Siège est désormais de rigueur. Les entreprises jésuites retrouvent une nouvelle vigueur. L’Église s’il- lustre dans une entreprise spectaculaire d’évangélisation, de formation, de tra- duction et d’édification des masses. Des centaines de congrégations religieuses voient le jour en Europe, œuvrant massivement dans le domaine éducatif et médical. Le xix e siècle permet aux catholiques de rechristianiser des régions entières et de convertir des espaces jusque-là hors de portée tels que Genève, l’Angleterre ou les États-Unis. L’Église semble cependant vaciller face au défi de la modernité. La rupture est consommée lors du premier concile du Vatican (1869‑1870) avec la procla- mation du dogme de l’infaillibilité pontificale, qui atteste un fossé grandissant avec le monde moderne mais aussi avec les autres confessions chrétiennes. Le mur d’incompréhension semble plus profond que les remises en cause auxquelles l’Église a déjà été confrontée dans le passé. C’est la prétention des Écritures à dire vrai et du christianisme à informer l’existence des individus qui est plus fonda- mentalement remise en cause. Au début du xx e siècle, la querelle est conduite sur le front scientifique, entre partisans et ennemis du darwinisme, et entre défenseurs et opposants d’une lecture historico-critique des textes sacrés. Menée au sein même de l’Église, l’offensive moderniste pousse les autorités cléricales à excommunier l’un de ses porte-drapeaux, l’abbé Loisy, qui prétendait intro- duire les sciences religieuses au cœur de l’Église. Avec Vatican II (11 octobre 1962‑8 décembre 1965), le catholicisme baisse les armes et accepte de dialoguer de façon constructive avec la modernité, se réconciliant avec un pluralisme et un œcuménisme contre lesquels il avait si longtemps combattu. Le dernier concile catholique est convoqué par le pontife Jean XXIII avec la participation de plus de 2 000 évêques et généraux d’ordres religieux. Il réduit le centralisme pontifical, supprime la liturgie latine au profit des liturgies en langues vernaculaires et accepte l’introduction des méthodes his- toriques dans les enseignements religieux. Avec à sa tête Jean-Paul II, la papauté regagne prestige et influence. Le spectre de la déchristianisation n’en demeure pas moins présent ; la désertification des églises et la crise des vocations ecclé- siales en témoignent amplement.

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