Bassin versant | Margat, Jean

Bassin versant 151 Les bassins versants méditerranéens partagés Les lignes de partage des eaux fixées par la nature ne coïncident pas néces- sairement avec les frontières politiques héritées de l’histoire humaine et non immuables. On compte une vingtaine de bassins transfrontaliers, si peu que ce soit, dans le bassin méditerranéen (planche IX). Leur nombre s’est accru depuis la « balkanisation » de l’ancienne Yougoslavie ; ils couvrent ensemble le tiers du bassin méditerranéen conventionnel et leurs débits totalisent 46 % de l’écoulement global du bassin (en comptant le débit naturel du Nil à Assouan). Cependant, beaucoup comme ceux de l’Èbre ou du Pô ne sont transfrontaliers qu’accessoirement. Seuls sont nettement morcelés plusieurs bassins balkaniques (Drin, Vardar, Stroupa, Maritza) et l’Oronte, au Proche-­ Orient, dont témoignent les doubles ou triples dénominations, plus naturel- lement le Nil, avec les conséquences géopolitiques que l’on sait : rivalités pour les ressources en eau, antagonismes entre les occupants des sites d’aménage- ment sécuritaires, sujets à impact, et ceux des zones menacées d’inondation, pollutions transfrontalières. La somme des écoulements transfrontaliers actuels dans le bassin médi­ terranéen, donnée plus significative, s’élèverait à environ 120 km 3 /an dont une bonne moitié au nord (Balkans essentiellement), 46 % au sud (Nil presque exclusivement, en comptant l’apport réel à Assouan) et à peine 2 % au Proche-­ Orient. Mais la vivacité des compétitions est davantage proportionnée à la rareté des ressources à partager qu’à leur volume. Moins visiblement, des aquifères peuvent aussi être en partage : l’exemple le plus notoire est celui du Mountain Aquifer commun à Israël et aux territoires palestiniens (Cisjordanie). Peu de conventions internationales règlent ces partitions. La plus importante fixe, depuis 1959, le partage du débit régularisé du Nil à Assouan (74 km 3 /an compte tenu de la perte par évaporation du réservoir) entre l’Égypte (55,5 km 3 /an) et le Soudan (18,5 km 3 /an). Un accord entre le Liban et la Syrie a fixé, en 1995, à un tiers et deux tiers leurs parts respectives du débit moyen de l’Oronte supé- rieur (0,64 km 3 /an). Des problèmes très similaires, engendrant des contraintes analogues sur les exploitations, peuvent se poser à l’intérieur de certains pays, notamment ceux de structure fédérale ou à décentralisation régionale, où des conflits d’intérêts et d’objectifs peuvent opposer les collectivités d’amont et d’aval dans des bassins étendus, ou encore les collectivités concernées par des transferts d’eau projetés entre bassins (exemples en Espagne, en Grèce…). Jean Margat

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