Ancre | Pomey, Patrice

Ancre 80 Ancre Par son caractère vital pour le navire, l’ancre occupe une place importante dans l’histoire de la navigation en Méditerranée au point d’acquérir une valeur symbo- lique très forte dans l’imaginaire collectif des peuples méditerranéens. Instrument destiné à maintenir le navire en place et à empêcher sa dérive, l’ancre est indis- pensable à la sécurité du navire et constitue le dernier recours pour éviter sa perte. L’histoire des ancres est liée à celle de la navigation, et les plus anciens témoi- gnages remontent, en Méditerranée, au III e millénaire av. J.‑C. Les premières ancres primitives en pierre, de forme arrondie ou triangulaire, étaient simple- ment munies d’une gorge ou d’un trou pour leur amarrage. Elles agissaient par leur simple poids et de ce fait leur efficacité était limitée. Les plus élaborées pouvaient affecter une forme pyramidale et atteindre un poids plus important. Utilisées en chaîne, elles pouvaient maintenir des navires d’un certain tonnage. Une autre forme d’ancre primitive, techniquement plus élaborée, était constituée d’une pierre triangulaire ou trapézoïdale, traversée de plusieurs trous : l’un, dans la partie supérieure, pour attacher un cordage ; les autres, dans la partie inférieure, pour recevoir des fiches de bois pouvant se planter dans le fond. Ces différents types d’ancres primitives pouvaient connaître des variantes selon leur forme et le nombre de trous ainsi qu’en témoignent les nombreuses ancres retrouvées dans des sanctuaires des deux premiers millénaires av. J.‑C. où elles avaient été déposées en offrandes. Mais en dehors de tout contexte archéologique, ces types d’ancres primitives en pierre sont difficilement datables. Par leur simplicité, elles ont tou- jours été utilisées en Méditerranée et le sont encore de nos jours par les pêcheurs. Vers le vii e siècle av. J.‑C. intervient une évolution technique radicale qui préfigure le principe de l’ancre moderne. Sur une longue pièce de bois, appelée verge, viennent s’assembler dans la partie inférieure un ou deux bras en bois, devant crocher le fond, et dans la partie supérieure un jas, situé perpendiculai- rement au bras. Ce dernier, par son poids, doit maintenir l’ancre sur le fond, et par sa position faciliter l’accrochage des pattes. Selon la tradition, l’invention en est attribuée au philosophe grec Anacharsis, originaire de Scythie, ou encore

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