Alimentation | Herrscher, Estelle; Saunier, Elia; Sauvegrain, Sophie-Anne

Alimentation 76 de comportement alimentaire touchent une grande majorité de la popula- tion méditerranéenne, avec des variations selon l’âge ou le niveau d’éducation. Ainsi, les personnes plus âgées et celles ayant un niveau d’éducation plus faible semblent avoir un régime plus « méditerranéen ». De la même façon, les ruraux consomment plus de légumes et moins de viande que les urbains. Devant de telles transformations, plusieurs auteurs considèrent aujourd’hui le régime médi- terranéen comme plus ou moins moribond. Sur la rive nord, la consommation des lipides (produits laitiers, huiles végétales…) et des sucres augmente, tandis que celle des plats réclamant fraîcheur et préparation diminue. La consomma- tion globale des produits traditionnels baisse également sur la rive sud. Selon une étude de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture ( fao ), les pays méditerranéens voient la plus forte détérioration de leur diète, particulièrement avec la consommation de graisse et une consommation énergé- tique globale : les moyennes sont au-dessus de celles de l’Union européenne. On ne distinguerait alors plus le fameux régime méditerranéen des autres modèles et on constaterait une perte des effets bénéfiques qui lui sont associés. Dès le début des années 1960, l’étude de la Communauté européenne de l’éner- gie atomique ( ceea ou e uratom) avait mis en évidence des différences entre les alimentations de l’Europe septentrionale (dont l’Italie du Nord) et l’Europe médi- terranéenne. Ce n’est toutefois qu’en 1975 que le scientifique américain Ancel Keys démontre, à partir d’une étude de plus de vingt ans portant sur le régime ali- mentaire et les risques cardiovasculaires de différents pays européens, les caracté­ ristiques et les bienfaits de ce qu’il appelle le « régime méditerranéen ». Depuis, les recherches médicales sur le régime méditerranéen se sont multipliées, étudiant principalement le lien entre l’huile d’olive et les maladies cardiovasculaires. Par sa composition, ce régime comporte peu d’éléments délétères tels que les acides gras saturés trans ou le cholestérol. En revanche, il est riche en éléments béné- fiques pour la santé comme les fibres et les carbohydrates complexes, les acides gras insaturés, vitamines, minéraux et composés dérivés de plantes non nutritifs (caroténoïdes, phytostérols, flavonoïdes, glucosinolates…). Il joue ainsi un rôle primordial dans la prévention de maladies telles que l’hyperlipidémie, le diabète, l’obésité, les maladies cardiovasculaires ou les cancers (œsophage, estomac, pan- créas, sein, côlon). Des études semblent également montrer une relation entre le régime méditerranéen et la réduction du risque de maladie d’Alzheimer. Plus récemment, un lien avec la diminution des maladies cognitives en général aurait été établi. C’est notamment ce « concept purement biomédical faisant fortement appel à l’imaginaire de la tradition », comme le formule l’anthropologue Annie Hubert dès 1998, qui représente, aujourd’hui dans les populations occidentales, le modèle alimentaire idéal, c’est-à-dire un concept récemment élaboré par des chercheurs anglo-saxons, regroupant tous les habitants de la Méditerranée, sans

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