Introduction

Introduction 12 stratifiée dans le temps, qui d’ailleurs a connu une forte expansion ces dernières années. Malgré quelques efforts visant à dégager des perspectives générales, demeurent des problèmes de fragmentation des connaissances et de manque de communication entre traditions de recherche disciplinaires et nationales. Divisées par la barrière des langues et parfois par un certain « protectionnisme méthodologique », ces dernières ne communiquent pas aisément. On assiste à une disjonction peu harmonieuse des approches qui se servent souvent du terme « Méditerranée » pour désigner des réalités différentes. À cela s’ajoute le fait que les études méditerranéennes ont été confrontées à des courants cri- tiques assez influents. Un vaste savoir non pacifié Une dimension polémique s’avère indissociable des raisonnements concer- nant la Méditerranée : à ce sujet la dispute intellectuelle, tout comme la mer du célèbre poème de Paul Valéry, semble « toujours recommencée ». La Méditerranée a certes trouvé ses chantres inspirés qui ont accumulé des mil- liers de pages pour déchiffrer ses multiples visages – le milieu, les sociétés, les cultures, les histoires divergentes et imbriquées – et les recomposer dans un cadre unitaire. Mais elle a aussi ses adversaires inflexibles. Les efforts massifs visant à dégager des perspectives « méditerranéistes » ont déclenché de fortes oppositions et des critiques acerbes qui tentent régulièrement de faire voler en éclats les échafaudages patiemment édifiés pour soutenir la construction scien- tifique de la Méditerranée. Dans ce cadre, une série d’accusations est régulièrement portée contre la caté- gorie même de Méditerranée. Conception éminemment européenne, elle relè- verait essentiellement du mythe et de l’idéologie. Elle cacherait, sous le vernis d’une prétendue uniformité, des différences irréductibles entre ses composantes. Cette déformation ne serait pas innocente. La vision unitaire de la Méditerranée serait asservie, de manière plus ou moins consciente, à des mobiles de nature politique. Au cours de l’histoire, la catégorie de Méditerranée aurait véhiculé des visées impérialistes, et ce passé peu reluisant conditionnerait encore son présent. Sur ces points les adversaires de la Méditerranée ont raison. Les connotations idéologiques de cette catégorie sont évidentes si l’on considère sa place dans les discours politiques du passé et du présent. Mais il faut tout de suite ajouter que ces utilisations n’ont pas été univoques. Le concept de Méditerranée s’est prêté aux emplois les plus différents : de droite, de centre, de gauche, pour ainsi dire. En son nom, on a soutenu la légitimité de la colonisation de l’Afrique du Nord ou l’on s’y est opposé. Elle a été évoquée selon des perspectives racistes ou pour

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